
Nous n’avons qu’une vision relative du monde, une vision partielle, une perception limitée par nos cinq sens externes. Notre vision, notre ouïe, notre odorat, notre goût et notre toucher ne captent qu’une partie sommaire de toutes les informations contenues dans la pluralité du monde. Par conséquent, le monde tel que nous le voyons, tel que nous l’expérimentons, n’est qu’un écho de sa réalité absolue. Nous croyons appréhender le réel, mais au final nous n’en percevons qu’un aperçu. À titre d’exemple, certains animaux comme le chien sont capables d’entendre des fréquences sonores que nous n’entendons pas. D’autres animaux, comme le cochon notamment, possèdent un sens du goût beaucoup plus développé que le nôtre grâce à un nombre de papilles gustatives plus élevé. Certains serpents ou l’abeille détiennent la capacité de capter les rayonnements infrarouges ou ultraviolets grâce à un sens de la vue étendu. Il existe même certaines espèces animales équipées d’un sens appelé magnétoréception qui permet de détecter l’intensité et l'orientation d’un champ magnétique. Ces exemples montrent comment le monde tel que nous l’expérimentons à travers nos sens ne correspond pas tout à fait à sa vérité intrinsèque.
Parallèlement à cela, à un autre niveau, notre rapport au monde repose également sur une perception tronquée résultant de sa virtualité sociétale et culturelle. Car ce monde apparement tangible tel que nous pensons le connaître pourrait aussi bien être organisé et structuré tout à fait différemment. Avec un référentiel complètement autre. Cette variation existe d’ailleurs déjà d’un pays à l’autre. De part notamment les différences culturelles, environnementales, religieuses, politiques et autres. L’utilisation d’une fourchette, ancré dans notre culture et nos habitudes, n’est pas l’usage au Japon. Les enjeux sociétaux ne sont pas non plus les mêmes en France et en Corée du nord ou en Namibie. Nous observons donc de flagrantes différences entre les pays, mais qui pourraient être encore bien plus profondes si certains penseurs ou chercheurs dotés d’une autre orientation idéologique avaient triomphé sur ceux qui ont façonné notre monde au fil des siècles. Une troisième guerre mondiale, apocalyptique, pourrait aussi à posteriori totalement redéfinir et reconfigurer à tous les niveaux un espace d’existence qui serait dissemblable de celui que nous connaissons. Alors certes le monde est ce qu’il est, notre réalité actuelle avec laquelle nous devons évidemment composer, mais cela ne tient qu’à très peu de choses pour qu’il change de manière radicale. Les enjeux climatiques promettent d'ailleurs prochainement de bouleverser la donne et de redistribuer autrement les cartes. Idem en ce qui concerne la progression plus que croissante des nouvelles technologies qui s’immiscent de plus en plus dans nos vies. La réalité du monde n’est de ce fait nullement inscrite dans le marbre. Elle est, comme cela a finalement toujours été le cas, simplement transitoire. L’instantané d’une période vouée à changer au rythme des évolutions.
Comment se fait-il alors que nous nous agrippions si fortement, comme s’il s’agissait parfois d'une question de vie ou de mort, à la réalité d’un monde si fragile et surtout si artificielle ? Nous nous débattons de toutes nos forces pour ériger un idéal d’existence, qui, en fait n’a de sens, que dans un environnement ultra spécifique et qui ne fonctionne que selon une configuration, une disposition des choses extrêmement précise. Étrange, non ? Les repères structurants dont nous avons besoin en tant qu’êtres humains peuvent alors être une amorce d’explication, mais dans ce cas, pourquoi ne pas bâtir notre idéal sur des fondations plus solides et plus permanentes ? Pourquoi nous perdre quotidiennement, au détriment de notre bien-être, dans des enjeux émotionnels, économiques, relationnels, idéologiques de toutes sortes, qui non seulement ne nous rendent pas durablement heureux, mais qui pire encore, ont la capacité de nous plonger dans de profondes abîmes de souffrance ? Une solution de rechange doit être clairement envisagée si nous souhaitons vivre plus en phase avec un environnement en perpétuel mouvement et régi par des turpitudes illusoires. Pour sa part, notre dimension spirituelle prend appui, elle, sur un support assurément stable et résistant : le Soi, la Source, l’Âme, indifféremment nommée selon les aspirations intimes et personnelles de chacun. Quelle que soit la nature du monde, sa configuration, sa composition, elle demeure inchangée, imperméable face aux aléas de l’existence. Ce qui, indubitablement, contraste avec l’impermanence et la finitude d'un monde dans lequel nous nous inscrivons consciemment et inconsciemment avec une viscéralité morbide. Mais rassurons-nous, à présent nous savons que le monde, ses règles et ses enjeux, sont intégralement fictifs, cousus de fil blanc. Notre existence, notre bien-être, ne doivent plus à aucun moment dépendre d’une situation sociale, économique, affective, matérielle qui ne sont que des concepts imaginaires dictés par les circonstances d'un contexte précis. Arrêtons de croire que ce monde est vrai, qu’il nous faille absolument en sortir gagnant matériellement, y faire bonne figure, y rire ou pleurer en fonction d'évènements qui n'ont aucune prise avec le réel. Le matériel vole vite en éclat confronté à la moindre contrariété existentielle, au moindre accident de la vie, au moindre soucis de santé, au moindre moment de lucidité et de clairvoyance. Notre monde n’est qu’un terrain d'amusement. Rien de plus. Amusons-nous-y, profitons-en tant que possible, expérimentons-le dans toute sa potentialité afin de poursuivre au mieux notre cycle d'évolution, mais ne nous y associons sous aucun prétexte, car le risque encouru serait de nous retrouver déconnectés une bonne fois pour toute de notre dimension spirituelle qui représente in fine notre véritable Réalité.